Les ennemis du dry hopping

ennemis dry hop

Le dry hopping (aussi appelé houblonnage à cru) est une technique de houblonnage utilisée pour apporter un caractère subtil de houblon frais. Pour cela, les houblons sont additionnés à froid dans le fermenteur (ou contenants de maturation : bouteilles, fûts…) pendant la fermentation.

Ça, peut-être que vous le saviez déjà : nous vous en avions parlé dans nos articles sur « La Punk IPA » ou « Le houblonnage pour les nuls« .

Mais nous sommes loin de vous avoir tout révélé à son sujet!

Dans cet article, nous allons nous concentrer sur les ennemis du Dry Hopping que sont l’oxygène, la contamination, le « Hop Creep« , le surdosage ou bien la bière carbonatée.

Une fois que vous les connaîtrez, vous saurez quoi faire (ou ne pas faire!) pour les éviter 😉

Réussir son Dry Hopping

Si vous vous demandez comment réussir votre Dry Hopping et bien, vous n’êtes pas le(la) seul(e) ! Et nous laisserons Scott Janish vous répondre à notre place :

« Unfortunately, even after reading hundreds of pages of studies on the topic, I can’t with any certainty suggest the best way to approach dry hopping »
(Janish, 2019)

Traduction: « Malheureusement, après avoir lu des centaines de pages d’études sur le sujet, je ne peux pas avec certitude suggérer la meilleure façon de conduire un houblonnage à cru ».

Alors, peut-être que le meilleur moyen de savoir comment réussir votre dry hopping, c’est de connaître ses points faibles! Nous décrirons ici les 4 principaux facteurs limitant de cette technique de houblonnage.

L’ennemi #1: l’oxygène

La meilleure des bières fruitées pourra facilement devenir le plus horrible des jus de carton mouillé en cas d’oxydation… 

L’ajout des houblons en fermenteur apporte inévitablement de l’oxygène à votre bière. Et malheureusement la taille réduite des volumes en brassage amateur en fait des candidats encore plus sensibles.

Ajoutez vos houblons avant que la fermentation soit complètement terminée, ainsi la levure va consommer une grande partie voire la totalité de cet oxygène.

D’après Scott Janish, l’introduction des houblons autour des jours 3 à 5 semblerait être un bon compromis, la méthode idéale étant la purge au CO2 mais elle n’est pas réalisable par tous…

John Palmer propose une alternative pour désoxygéner cet apport de houblon : 

  •  Chauffez un peu d’eau pour faire s’évaporer l’oxygène, 
  •  Refroidissez-la jusqu’à température adaptée à votre fermentation,
  •  Ajoutez-y vos houblons, 
  •  Et jetez cette préparation indemne d’oxygène directement dans votre fermenteur.

Scott Janish donne également une astuce : quelques brasseurs avec qui il a parlé et qui aiment houblonner après la fermentation, ajoutent une petite quantité de sucre avec les houblons pour encourager une refermentation rapide.

La contamination

Chaque action doit être réfléchie en vue d’éviter une contamination. A ce stade, votre moût est à une température idéale pour un développement microbien avec un niveau d’oxygénation normalement optimal et des nutriments à profusion .

Bactéries danger !

La chance que nous avons réside dans le fait que le houblon possède intrinsèquement des propriétés antiseptiques (un souci en moins). De plus, dans ce moût en début de fermentation, l’alcool est déjà un peu présent. 

Cependant, les ouvertures de fermenteur doivent être brèves et réalisées dans un environnement sain. Vous devez éviter de perturber le lit protecteur de CO2 qui s’est installé à la surface de votre moût. L’homogénéisation au fourquet, même s’il est stérile, est donc souvent une mauvaise option.

Si vous optez pour l’utilisation d’un infuseur à houblon (aussi appelé Hop Tube), celui-ci doit avoir été stérilisé. Attention aussi aux chaussettes de houblonnage en tissu ( prévoir une immersion de quelques minutes dans de l’eau en ébullition)!

Utilisez un infuseur à houblon stérilisé !

Le Hop Creep

Que se cache t’il derrière ce nouvel anglicisme?
Retenez ceci : le Dry Hopping peut conduire à une refermentation en raison de la présence d’enzymes dans le houblon, telles que l’alpha-amylase, la beta-amlylase et l’amyloglucosidase.

Ces enzymes sont capables d’hydrolyser les dextrines présentes dans la bière en sucres fermentescibles. Ces sucres fermentescibles supplémentaires seront consommer par les levures et entraîneront une sur-atténuation. Autrement dit, votre densité finale sera plus faible qu’attendue.

Conséquences :
– une teneur en alcool plus élevée que prévue (pas forcément un problème, c’est vrai!),
– une augmentation du CO2 ce qui peut provoquer des gushings voir pire, des explosions de bouteilles!

Autre mauvaise nouvelle : ce Hop Creep produit des précurseurs de diacétyle, un faux-goût indésirable pour la bière (saveur de beurre rance). Prévoyez donc du temps et une température pas trop froide pour que vos levures puissent consommer ce diacétyle non recherché.

Une température élevée et un temps de contact long favorise cette hydrolyse des dextrines.

Les recommandations pour éviter cette activité enzymatique sont donc de faire un houblonnage court (pas plus de 3 jours) et à des températures « fraîches » (10-14°C).
Autre option: faire un soutirage pour éliminer la levure avant le dry hopping.

Le surdosage, risque de Hop Burn

Lorsque les quantités de houblons en dry hopping sont très élevées :

l’amertume de la bière augmente.
Oui, vous avez bien entendu ! Alors bien sûr, cette amertume ne provient pas de l’isomérisation des acides alpha puisque les températures de fermentation sont bien trop basses pour cela (entre 4 et 25°C).
Mais une amertume sera apportée en raison des acides alpha et bêta oxydés et de l’ajout de polyphénol. 
On parle alors de Hop Burn.

– le pH augmente, ce qui nuit à la buvabilité de la bière et à la tenue de mousse.
Les théories actuelles sous-entendent que cela proviendrait de la matière végétale et non de la lupuline du houblon.

Bière carbonatée, gare au Dry Hop Volcano!

Faites bien attention si vous voulez réaliser un dry hopping dans un fermenteur sous pression.
Car, si vous connaissez l’effet « Mentos dans un coca » et bien l’effet « houblon dans une bière carbonatée » donne le même résultat : un geyser incontrôlable que les brasseurs appellent Dry Hop Volcano !

Ce phénomène est causé par la nucléation. Lorsque vous ajoutez des pellets de houblon à votre bière carbonatée, une partie du CO2 dissous dans la bière est libérée au contact de la surface du pellet.

C’est ce même phénomène qui est recherché quand vous voyez ces verres avec un dessin gravé au fond : cette surface plus poreuse va encourager la formation de bulles dans le verre. Oui, c’est un peu de la triche 😉

Verre nucléé de Chimay avec fleur de lys gravée au fond

Pour aller plus loin

Tu veux tout savoir sur le houblon, les différentes techniques de houblonnage
et en particulier sur le sujet du dry hopping ?
– Comment le réaliser ?
– Quelle quantité de houblons utiliser ?
– Quand faire l’ajout ?
– Quelle forme de houblon choisir ?
– Combien de temps laisser les houblons dans le fermenteur ?
– Faut-il agiter le fermenteur pendant le dry hopping ?
– Quelle température de fermentation préférer pendant le dry hopping ?

Retrouve toutes ces infos dans « Devenir un as du houblonnage | Le livre » ou « Devenir un as du houblonnage | La formation » (encore plus complète) !

Petit brasseur, où en es-tu ?

As-tu réussi à trouver les bonnes conditions pour tes houblonnages à cru ?

Est-ce que tu as expérimenté malgré toi quelques déconvenues avec cette technique ?

As-tu d’autres astuces à partager avec nous ?

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A très vite.

5 Comments on “Les ennemis du dry hopping

  1. Merci pour cet article qui synthétise les bases de Dry Hopping.

    Nous on est des gros gros amateurs de jus de houblon et donc de dry hop, c’est vrai que c’est un vrai casse tête. Température, quantité, nombre de jours ça fait 3 ans qu’on essaie et de notre modeste expérience :
    -La fermentation sous pression évite l’oxydation et a un réel intérêt pour les bières avec DH
    -Les bières se conservent mieux en keg qu’en bouteille quand il y a eut un DH
    -Le goût du DH se conserve mieux au frais qu’à température ambiante pour la garde des bières
    -On a jamais réussi à faire tenir le goût d’un DH plus de 3 mois (et c’est déjà pas mal !)
    -A plus de 8g/L on n’a pas vu de différence significative (sauf NEIPA ou on fait 2 DH)
    -A plus de 8g/L on a toujours un peu de hopburn au début qui s’estompe en quelques semaines (2-4)
    -Un bon hopstand/flamme out avec 30-50% de ce qu’on compte mettre en DH nous a apporté de meilleurs résultats.

    Pour les températures et le nombre de jours on a fait pas mal d’essais mais on a pas encore identifié la meilleure combinaison je conseillerais aux « débutants » de rester entre 4/L et 6g/L j’ai l’impression que tous les ennemis du DH ont tendance à se manifester au dessus de 6g/L.

    pour finir je dirais qu’une bière avec un DH il faut surtout la boire vite !

  2. Super article, c’est vrai que le DH peut provoquer quelques surprises !!
    Dans mon cas je cale mon DH selon ma date d’embouteillage, à -3jrs.
    Au préalable je coupe le maintien en température et je laisse descendre la t° jusqu’à l’embouteillage. J’évite un ajout des houblons au dessus de 14°.
    En général je fais un ajout de 5 à 8 gr/l, des gros ajouts au dela de 20gr peuvent flinguer un brassin si les conditions sont mal maîtrisées et on retrouve facilement les ennemis listés dans votre article 🙂

  3. Hello, très intéressant!

    moi je procède de la façon suivante, car je n’ai pas de fut sous pression, je fermente toujours avec le seaux en plastique :

    Je désinfecte mon hop tube (eau bouillante + bain chemipro), je le pose au fond d’un seau de fermentation (nettoyé + désinfecté)… et je fais un transfert via l’auto-siphon en prenant garde de mettre le tuyau bien au fond pour un écoulement sans « splash ».
    Ca me permet aussi d’éliminer les sédiments (surtout quand on utilise de la S-04 😀 !)

    Système D represent 🙂

    Alors oui, c’est pas terrible, y’a une exposition à l’air libre non recommandée (en même temps je fais pas de NEIPA), mais j’ai bricolé mon auto-siphon de façon à avoir rajouté un tube plus large avec un écoulement plus rapide.
    Pour l’instant, cette façon de faire me convient, en attendant d’avoir du matériel plus adapté. (mais avouons-le, être brassam c’est avoir un waf quand même assez bas :D)

    En tout cas, sur 3 brassins, je n’ai eu aucun souci de faux-goûts.

    • Salut Alex,
      Merci pour ton partage d’expérience!
      Et je suis bien d’accord avec toi, on adapte tous nos techniques en fonction de notre matériel (et de notre feeling de brassam!).
      Et si tu es satisfait du résultat, c’est bien ça qui compte! 😉

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